Si nous reprenions les bases ?… plutôt la base, à savoir l’acte médical et, par extension, l’acte de soins.
Tout d’abord, qui doit en définir sa nature, son contenu?
Pas le seul médecin, pas le seul patient, encore moins l’autorité politique ou l’assureur, qu’il soit public ou privé.
L’acte médical débute lorsque le patient va voir le médecin.
Il expose ses symptômes que le médecin se doit d’écouter, analyser, faire préciser pour en tirer des premières conclusions. Le médecin se doit aussi d’être à l’écoute de la manière dont le patient interprète ses symptômes.
Vient ensuite le temps de l’examen clinique, plus ou moins long mais incontournable.
C’est ensuite, et seulement ensuite, que le médecin pose un diagnostic ou émet des hypothèses diagnostiques qu’il étaiera si besoin par des explorations complémentaires adaptées. Viendra ensuite, et seulement ensuite, le temps du traitement qui s’envisage dès la première consultation ou dans un second selon les cas.
Qu’est devenu l’acte médical ?
J’ai l’impression que beaucoup de patients se plaignent de ne pas être écoutés et examinés.
Combien de fois ai-je entendu “c’est la première fois qu’un médecin prend le temps de m’écouter et de m’examiner comme vous l’avez fait”.
Si beaucoup le disent, c’est qu’il y probablement du vrai (les patients ne sont pas tous des flatteurs ou, à l’opposé, des jamais contents). Cela ne veut pas dire que je sois meilleur qu’un autre mais il est vrai que je prends le temps qui me paraît nécessaire, ce d’autant que je suis très souvent confronté aux maladies neurodégénératives.
Le problème est sans aucun doute là, il faut du temps, un minimum, pour effectuer correctement une anamnèse et un examen clinique. Or, en libéral, le temps, c’est de l’argent. Si le médecin est consciencieux, rigoureux, il lui faudra du temps pour réaliser l’acte médical. Je prends peut-être, personnellement, “trop” de temps mais, en tout cas, je ne parle pas de la pluie et du beau temps avec les patients et il est certain qu’il en faut un minimum de temps.
Certains d’entre nous se satisfont d’une médecine express, faisant alors plus du chiffre que de la Médecine. Je doute qu’ils représentent la majorité.
Beaucoup n’ont plus le choix s’ils veulent vivre honnêtement de leur activité. Il faut beaucoup d’actes et il n’est donc plus possible de consacrer le temps minimum. Certains exploseront en vol, les drames sont récurrents.
Malheureusement, l’acte médical devient un acte merdical, bâclé. Et c’est le médecin qui sera accusé de mal faire son travail, de ne pas avoir écouté le patient, imposant son diktat plutôt que s’orienter vers une médecine participative où le patient (quand il le peut) est invité à sa prise en charge… Le médecin sera aussi accusé de trop prescrire, de ne pas avoir correctement informé…
Il est donc grand temps de remettre les pendules à l’heure!
Je m’adresse aux collègues, aux syndicats, à notre Ministre, clinicienne.
Ce n’est pas à coups de ROSP, CAS, OPTAM, revalorisations au compte-gouttes… que la Médecine française va retrouver la place qu’elle mérite.
Il est temps de redéfinir l’acte médical qui ne peut être considéré comme un acte d’ouvrier spécialisé.
Il est temps de redéfinir ce qu’il faut attendre de l’acte médical, des actes de soins, et de se donner les moyens pour les respecter.
Il faut, si besoin (et il me semble que ce soit le cas), remettre à plat le système de prise en charge par l’assurance, qu’elle soit obligatoire ou complémentaire, pour permettre l’accès aux soins pour tous TOUT EN RESPECTANT l’acte de soin.
À défaut, la qualité du soin va continuer à se dégrader (ce qui en majorera le coût !), les soignants les plus sérieux disparaîtront, le sentiment de mauvaise prise en charge augmentera (et les plaintes associées), le charlatanisme et le pseudo-soin proliférera.
Mon choix personnel est fait, je ne continuerai à soigner que si les moyens m’en sont donnés… et vite !
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