Ce vendredi 19 novembre, quarante députés présenteront un projet de loi pour lutter contre les déserts médicaux.
En voici les mesures principales :
– l’obligation pour les jeunes médecins de s’installer trois ans en zones sous-dotées en médecins avant de pouvoir s’installer en zones territoriales sur-dotées en médecins…
– l’installation en zones sur-dotées sera conditionnée au départ d’un médecin,
– toute modification du lieu d’installation sera conditionnée à un préavis d’un an,
– l’obligation d’une réalisation d’un stage en zones sous-dotées en médecin,
– la révision chaque année par les ARS de la répartition des zones sur-dotées et sous-dotées,
Les raisons données sont toujours les mêmes… Selon Mr Thierry Benoit député portant le projet de loi « Les études de médecine sont financées par l’argent public, le remboursement des consultations est assuré par la Sécurité sociale qui est abondée par les cotisations sociales des citoyens ». C’est donc, dans l’esprit des promoteurs du projet de loi, pour une sorte de remboursement à la nation que les médecins devraient s’installer dans les déserts.
À ceux-là et à toutes celles et ceux qui, année après année, ressortent cet argument, l’UFML-S rappelle que :
– l’État ne paie pas plus les études des médecins que celle des autres professions,
– la formation de médecins a un rapport qualité-prix bien meilleur que celle d’un énarque…
– les médecins remboursent la nation tout au long de leurs études en assurant le fonctionnement des hôpitaux pour des salaires symboliques et des horaires à rallonge,
– les médecins sont déjà allés travailler plusieurs années en zones sous-dotées au cours de leur cursus, pour assurer la survie des hôpitaux périphériques
– les jeunes médecins mettent dix ans à s’installer en médecine libérale. Moins de 9 % d’entre eux s’installent au sortir de la faculté.
Les médecins qui choisissent la médecine libérale le font en conscience. C’est un choix de vie. Ils ne sont ni les salariés de l’état, ni ceux de l’assurance-maladie, ni les petits personnels de responsables politiques en mal d’électeurs. À l’heure d’un monde globalisé, rien ne les oblige à s’installer en France où les tarifs des actes sont quasiment les plus bas de la moyenne européenne. L’attractivité de la profession est d’ailleurs en chute libre.
Ce ne sont pas les médecins qui ont détruit les territoires, fermé les services publics, multiplié les faillites, les disparitions de commerces et d’artisanat. Ce ne sont pas les médecins qui ont provoqué les départs, d’une ruralité devenue sans avenir, vers la ville. Ce ne sont pas les médecins qui ont organisé la fuite de la République de certains territoires urbains. Ce ne sont pas les médecins qui ont laissé se développer la spéculation immobilière, stérilisant ainsi des quartiers entiers de toutes nouvelles installations.
En revanche, ce sont les politiques qui ont décidé de ne pas augmenter les tarifs des médecins malgré le coût et la responsabilité de leurs pratiques et leur rôle dans la société.
Le bilan des politiques sanitaires est terrifiant :
– les trois quarts des Français vivent sur des territoires classés en zones d’interventions prioritaires ( ZIP) ou en zones d’actions complémentaires (ZAC), ces territoires où les Français sont confrontés au déficit de médecin. 96,5 % de la population d’ile de France est dans ce cas…
– les abandons de plaques des médecins de ville se font plus nombreux et ils ne sont pas remplacés. En cause, l’épuisement, l’augmentation de la demande de soin, le consumérisme, la perte de sens, la violence administrative…
– 75 % des internes ont des critères d’anxiété, 50 % des médecins généralistes ont au moins un critère de burn-out, et les taux de suicides de la profession sont de 2,5 fois supérieurs à ceux de la population générale…
Pour L’UFML-S, le constat est terrible : la médecine de ville a été abandonnée depuis des années. Pire elle a été sabotée, par des responsables politiques de tous bords qui ne la connaissent pas et ne voient la médecine que par le prisme de l’hôpital. Nous accusons les responsables politiques, gouvernement après gouvernement de n’avoir rien fait pour la médecine libérale.
Ils se sont lavé les mains des difficultés croissantes qu’ils imposaient à la médecine de ville et aux patients. Ils ont « chosifié » les médecins libéraux, les imaginant corvéables et déplaçables pour éponger les drames construits par leurs soins. Ils ont ignoré la médecine de ville, pour se concentrer sur le seul hôpital public, qu’ils n’ont pourtant pas réussi à développer. Ils n’ont regardé la médecine de France que sous l’angle du coût et non de ce qu’elle peut engendrer comme richesse pour la nation.
Nous accusons ces politiques d’être responsables et coupables des déserts médicaux, des difficultés d’accès au soin et des inégalités sociales en santé. Nous les accusons de n’avoir aucune volonté de sauver notre système de santé préférant préparer pour demain un système inégalitaire, à deux vitesses. Nous les accusons de ne pas connaitre la médecine libérale, de ne rien comprendre à cette médecine à laquelle les Français accordent leur confiance dans des taux qui devraient imposer son développement et non sa casse organisée ( 88 % de taux de confiance envers leur médecin libéral, 94 % pour les patients en affection de longue durée).
Pour l’UFML-S la médecine de ville doit relever d’un plan Marshall afin de réparer trente ans d’erreurs politiques. La protection du système solidaire passe par une médecine de ville forte aux côtés d’un hôpital fort. La médecine de ville n’est pas une sous médecine, elle est faite de femmes et d’hommes qui ont choisi ce mode d’exercice, pour éviter les lourdeurs, pour sa réactivité, ses responsabilités, sa liberté d’entreprendre.
Les médecins libéraux ne sont pas des salariés, ils exercent au sein d’un système solidaire où chacun cotise selon ses moyens et perçoit selon ses besoins, pour cela ils passent convention avec l’assurance-maladie. Ils ne sont pas pour autant, les employés de l’assurance-maladie et au regard de l’évolution de ce contrat devenu léonin celui-ci plus que jamais pourraient être rompu.
L’UFML-S appelle les responsables politiques à la prudence. Le dé-conventionnement n’est pas un Rubicon impossible à franchir. Il ne tient que par un système indigne qui pénalise le patient qui consulte un médecin non conventionné, en le remboursant de l’acte médical sur la base du tarif d’autorité soit 0,61 euro pour une consultation de médecine générale et 1,62 euro pour celle d’un médecin spécialiste. L’assurance maladie a ainsi créé depuis des années, ce que la loi a refusé pour les mutuelles et assurances privées : un réseau de soin fermé ou l’assuré est mieux remboursé s’il consulte un médecin sous contrat avec l’assurance pour laquelle il cotise…
Cette barrière pourrait bien se déchirer tant la demande de soin est supérieure à l’offre, tant l’exercice devient de plus en plus difficile au sein d’une profession, sous les coups de boutoir de mauvaises politiques. Demain les médecins pourraient, en nombre, tourner le dos à ce qui ressemble de plus en plus à une servitude.
Pour être sauvé, le système relève d’une urgence, une seule, qui tient en trois mots : l’installation, l’installation, l’installation. Celle-ci ne doit pas être obligée, mais favorisée et facilitée. Elle doit dépendre d’une politique qui prendrait comme postulat de travail, la médecine libérale dans toutes ses dimensions. Une politique basée sur la connaissance de la médecine libérale, de ses spécificités, ses apports, ses avantages, et plus important encore, sur la connaissance de celles et ceux qui la font.
À l’opposé des politiques précédentes construites au travers du prisme de l’hôpital public.
Aucune politique sanitaire ne s’est construite sur ces simples bases, et, régimes après régimes, gouvernement après gouvernement, la médecine de ville a été lue au travers du prisme de l’hôpital public. Le résultat en est cette chronique d’un échec annoncé, échec d’autant plus important que ces politiques successives ont déstabilisé ce même hôpital public.
La santé comme l’accès aux soins et la première préoccupation des Français. Elle devrait avoir la première place des programmes des candidats à la présidence de la république. Les responsables politiques feraient bien de s’en souvenir.
L’UFML-S appelle à une réforme systémique et à l’arrêt des mesures cosmétiques. Nous souhaitons la construction d’un nouveau pacte social où la médecine libérale reprendrait toute sa place aux côtés de l’hôpital public.
Une réforme où serait abordée :
– le mode de financement de l’assurance maladie,
– le rôle et la place des organismes assurantiels,
– la gouvernance du système sanitaire et l’ouverture de celui-ci aux soignants pour tout ce qui touche à l’organisation du soin et de l’exercice,
– la démocratie sanitaire avec une place plus importante et véritablement décisionnelle faite aux représentants des soignants et des patients,
– les rémunérations et tarifs des actes des médecins libéraux qui sont aujourd’hui indignes d’un pays occidental, largement sous-évalués, car liés à l’état économique de l’assurance maladie et donc à son mode de financement.
Ce ne sont pas des mesures d’obligation d’installation qui sauveront notre système solidaire. La médecine ne peut pas se construire sans connaitre et respecter les médecins. Oublier cela c’est construire encore et encore pour demain une France sans médecins.
Relations presse :
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UFML syndicat : le syndicat de l’union française pour une médecine libre
vous pouvez ajouter que dans de nombreux endroits les médecins sont l objet de violences physiques ou d actes d incivilité et qu ils sont moins préparés que les forces de l’ordre à se défendre et que leur déontologie les contraint à aller au feu au mépris de leur sécurité
plus les mesures seront contraignantes , moins la médecine libérale sera choisie ! rien qu”évoquer la possibilité d’évoquer ces contraintes futures est dissuasif
le systéme allemand impose une sorte de conventionnement à la carte mais les conditions d exercice sont bien différentes
La santé comme l’accès aux soins EST la première préoccupation des Français et non ET la première préoccupation des Français
Comme disait de Gaulle :il ne faut pas demander à ceux qui ont créé les problèmes, de les résoudre.
Et si on réglait cela entre libéraux, plutôt qu’avec les charlots de la politique qui vont promettre Noël pour tous en avril 2022?
Bravo pour cette analyse.