Re-certification, Piège à cons !
La médecine de ville subit toujours avec 10 ans de retard ce qui a été testé puis mis en place en milieu hospitalier…
Le drame est que l’expérience ne sert jamais de leçon et, une fois de plus, est une lanterne qui n’éclaire que celui qui la porte….
L’idée du CNOM d’une re-certification tous les 6 ans afin de “mise à niveau” “d’autotest” “d’autoévaluation”, pourrait être une bonne idée…mais “l’agencionite”, mal français, immanquablement agira, alourdira, complexifiera, obligera…
Les établissements hospitaliers ont connu l’accréditation, puis les certifications basées sur la fameuse “roue vertueuse” j’auto-évalue, je cible l’élément à corriger, je mets en place action, j’auto-évalue etc…
La volonté était de tirer les établissements vers le haut et de laisser les acteurs faire leur autoévaluation….Mais nous sommes en France et …une Agence fut créée : l’ANDEM Agence Nationale pour le Développement de l’Evaluation Médicale (il fallait tester le process, lancer le bouzin, trouver des établissements pour évaluer l’évaluation), qui se transforma en ANAES : Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation des Soins.
Le système était dès lors en marche. Les premières accréditations (V1) furent lancées, validant le concept, le rendant obligatoire, l’HAS Haute Autorité de Santé succéda à L’ANAES, le mot Autorité étant alors à double sens : “Autorité Expert” et “Autorité Sanction”. L’accréditation devint certification (V2, V3, V2010, en continu …)
Chaque modèle de certification devint plus dur que le précédent….
Comme un indicateur, une certification, pour être reconnue validante, doit avoir un taux d’échec (établissement non certifié), un taux de réussite et un taux de réserves et de recommandations (valant corrections et vérifications).
De ce principe naît la complexification : en effet si le niveau reste le même, le résultat positif finit par être atteint par tous et la certification n’a plus de valeur…
L’hospitalisation s’est donc engagée dans une course folle à la complexification, a été soumise à des certifications toujours plus lourdes à préparer, toujours plus chères, nécessitant la création de nouveaux métiers (Responsable qualité), la présence de Comités de pilotage tout au long du temps, la création de groupes dédiés qui travaillent sur la certification chaque jour, diminuant le temps de soin. Dans le même temps, les périodes entre les certifications se sont réduites, passant de 5 ans à 4 ans …pour devenir continues avec l’évaluation tout au long du temps et “le patient traceur”. Et les bâtiments de l’HAS n’ont cessé de grandir, son personnel d’augmenter, ses “experts” de se multiplier puisant dans la réserve d’une profession médicale en chute démographique…
Avec le recul que sait-on?
Les points positifs : la dynamique de la qualité, la réflexion des équipes au sein de l’autoévaluation, la mise en place des procédures et des protocoles ont amené une certaine culture de la qualité qui a bénéficié au patient ….mais…
La lourdeur du processus a souvent déstructuré les équipes et pénalisé le temps de soin.
Le coût des certifications n’a jamais trouvé de remboursement, pas le moindre retour sur investissement (non seulement l’établissement paye ses travaux de mise à niveau mais paye également les experts visiteurs).
Le résultat des certifications, quand il est positif (sans réserve et sans recommandation, avec des “actions remarquées” (ancien “points forts”)), ne donne lieu à aucune augmentation tarifaire, aucune retombée de l’administration.
Le résultat négatif entraîne lui une deuxième lame de vérification qui s’ajoute à celle de l’HAS par l’alerte provoquée au niveau de l’ARS dont les contrôleurs médecins et administratifs entrent alors en jeu…
Le système est lancé dans une course folle, de “piloté par profession” “volontaire” “vertueux” le système est devenu “imposé” “obligatoire” “pénalisant et sanctionnant”.
Dernier avatar en date, il est proposé (donc bientôt possiblement imposé) aux établissements de Soins de Suite Réadaptation que les résultats des certifications soient pris en compte dans leur nouvelle tarification…
Or le système n’est pas stable mais basé sur une complexification… Un système à qui perd…perd !
Le CNOM a-t-il ces éléments, a-t-il regardé du côté des établissements de soin ?
A-t-il regardé le passé, le présent des établissements de soin pour regarder l’avenir de la médecine de ville ?
Il est à craindre que l’idée de re-certification des médecins ne produise les mêmes effets et n’amplifie encore un encadrement qui a fait la preuve de son impact délétère, de gosplan en gosplan (souffrance, maltraitance, déplaquage, vieillissement démographique, pénurie).
Les médecins doivent être alertés afin de prévenir les dérives et le risque d’enfermement, au final dangereux pour l’équilibre du système sanitaire et la qualité des soins prodigués.