On ne peut plus ignorer ni douter de la volonté, de plus en plus affirmée, d’une partie de la classe politique et de la CNAM, de maîtriser et contraindre l’exercice des médecins libéraux.
Les Conventions médicales et les lois de financement de la Sécurité Sociale (LFSS) successives n’ont eu de cesse d’encadrer nos prescriptions et suradministrer l’accès et l’offre de soins.
Voici les rouages de cette machine, sans état d’âme, qui asservira méthodiquement notre exercice :
– Mr le Premier ministre, Michel Barnier, a signé récemment un décret d’application de l’article 73 de la LFSS 2024 imposant de justifier une partie de nos prescriptions de médicaments, dispositifs médicaux et prestations associées. De plus, l’article 16 du projet de LFSS 2025 y ajoute les prescriptions de transports, de biologies et d’imageries médicales.
Ces justificatifs sont imposés dans un but économique plus que sanitaire et leur multiplication majorera notre charge administrative mais également le risque d’indus réclamés aux médecins et la baisse de remboursements des patients.
Décret n° 2024-968 du 30 octobre 2024 relatif au document destiné à renforcer la pertinence des prescriptions médicales – Légifrance
– La CNAM dans son rapport charges et produits pour 2025 formule 30 propositions tant pour améliorer la prise en charge des patients que pour maîtriser les dépenses. La lutte contre le gaspillage des produits de santé est défendue avec, au premier chef, le déploiement rapide des mesures en matière de pertinence et sobriété des prescriptions portées par la convention médicale.
2024-07_synthese-rapport-propositions-pour-2025_assurance-maladie.pdf
– Une obligation d’adhésion de tous les médecins exerçant en secteur 2 à l’OPTAM défendue par l’amendement n°2011 incluant un article additionnel au projet de LFSS 2025 et adopté en première lecture le 4 novembre 2024. Cette contrainte imposée d’une pratique tarifaire maîtrisée est notamment soutenue par Mme Firmin le Bodo et 33 autres députés.
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (no 325) Amendement n°2011 – Assemblée nationale
– L’ordonnance numérique qui va s’imposer dès 2025, permettant de sécuriser les délivrances et diminuer le risque de falsifications, facilitera notablement le contrôle de nos prescriptions par l’IA bien que la CNAM ait affirmé que seules les ordonnances délivrées en pharmacie seront évaluées.
– Des services médicaux des CPAM en sursis, après le rejet de l’amendement 2233 au projet de LFSS 2025 qui visait à inscrire leur dissolution. Or celle-ci entraînerait une mise sous tutelle de leur indépendance et liberté d’exercice sous l’autorité de la direction administrative des CPAM.
Le Service Médical de l’Assurance Maladie en sursis
– Une convention nationale dont la pertinence des soins imposera aux médecins libéraux des objectifs collectifs de dé-prescriptions de soins infirmiers, de kinésithérapie, d’antibiothérapie, de compléments alimentaires, d’imageries…etc.
Ces objectifs collectifs négligent la progression des polypathologies, le vieillissement de la population et surtout le virage ambulatoire alors que 80.000 lits d’hôpitaux ont été fermés en 20 ans.
– Le plan de lutte contre la fraude sociale promet d’être dur avec 1000 agents supplémentaires, la formation de 450 cyber-enquêteurs dotés de prérogatives de Police Judiciaire et une modernisation du système d’information.
Présentation du PLFSS 2025 – Presse – Ministère des Finances
Or l’article 102 de la LFSS 2023 est redoutable en raison de la condamnation par extrapolation des indus, permettant à la CNAM après une évaluation de votre pratique sur quelques mois de vous réclamer des indus sur 3 ans voire 5 ans en cas de fraude.
Article 102 – LOI n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023 (1) – Légifrance
– Les CPL, commissions paritaires locales des CPAM, ont le pouvoir de convoquer les médecins considérés tels des ‘délinquants statistiques’. Le dernier exemple en date est la chasse aux indemnités journalières (IJ) des arrêts de travail sur décision de la CNAM.
De plus et malgré un verdict favorable des commissions, le directeur de la CPAM peut y déroger et sanctionner chaque médecin faisant fi du verdict prononcé, par une décision arbitraire.
Article L114-17-2 – Code de la sécurité sociale – Légifrance
Il est important de mesurer la puissance destructrice de cette mécanique au service de l’intérêt supérieur de l’Etat et de son objectif de réduction drastique des dépenses, dont les premières victimes seront la qualité des soins et notre qualité d’exercice.
Tout est en place pour casser du médecin : une justification galopante de nos prescriptions dont la numérisation facilitera le contrôle, un service médical des CPAM en sursis, des objectifs collectifs imposés par la nouvelle convention, une extrapolation des indus, un renforcement des équipes de contrôle et des commissions sous le joug de sanctions arbitraires… ECHEC ET MAT !
Et ce mercredi, M le Député Guillaume Garot, a présenté une PPL signée par 237 députés qui défend l’installation sélective, l’obligation de participation à la PDSA, la limitation des remplacements à 4 ans et envisage de supprimer le S2 hors optam : une sérénité dans l’erreur qui force le respect !
Régulation à l’installation, PDS obligatoire et fin du secteur 2 : 237 députés à l’offensive dans une proposition de loi transpartisane | Le Quotidien du Médecin
Jamais les médecins libéraux n’ont été maltraités de la sorte.
Jamais le Code de Déontologie n’a été défié de la sorte.
Plus que jamais adhérez à l’UFML-S : Adhésion – Union Française pour une Médecine Libre Syndicat
Vous allez avoir besoin d’un syndicat fort dans les mois qui viennent car, je vous l’affirme, la profession va souffrir, et chacune et chacun d’entre vous pourrait être la cible de cette politique.
Dr Guillaume DEWEVRE,
Secrétaire Général & le BUREAU UFMLS