Extrait de l’Article du Parisien publié le 28 juillet 2022 à 12h12
Il est beaucoup question de « lapins » dans les conversations de médecins sur les réseaux sociaux depuis plusieurs jours. « Deux lapins ce matin sur cinq rendez-vous » ; « j’ai en moyenne trois lapins par jour », peut-on notamment lire sur Twitter. Les lapins désignent ici des consultations médicales non honorées et, selon un sondage récent, elles seraient en augmentation. L’Union régionale des professionnels de santé (URPS)-Médecins libéraux d’Île-de-France a en effet enquêté auprès de 2000 médecins libéraux franciliens -généralistes pour une moitié d’entre eux, spécialistes pour l’autre.
Le sondage, rendu public le 22 juillet, alerte sur la fréquence de ces rendez-vous manqués, avec une moyenne déclarative de deux lapins par jour et des pics pouvant aller jusqu’à cinq. « Pour 79 % des répondants, les rendez-vous non honorés représentent une problématique majeure dans leur organisation quotidienne », prévient l’URPS.
Les propositions des médecins libéraux d’Île-de-France face à l’augmentation du nombre de rendez-vous non honorés
Paris, le 22 juillet 2022
L’axe 4 du rapport de la Mission Flash présenté par François Braun au gouvernement, Redonner du temps de soins aux soignants, comporte une piste de réflexion sur les « moyens de lutter résolument contre les rendez-vous non honorés par une responsabilisation du patient ».
Les rendez-vous non honorés sont en effet une réalité quotidienne de la médecine de ville. Dans une enquête lancée le 8 juillet auprès des médecins libéraux franciliens, les 2000 premiers répondants témoignent d’un sentiment d’augmentation de ce phénomène, avec une moyenne déclarative se situant à 2 rendez-vous non honorés par jour et des pics pouvant aller jusqu’à 5. Un médecin sur deux considère que cette tendance est plutôt à la hausse et qu’elle se concentre majoritairement sur des nouveaux patients. Pour 79 % des répondants, les rendez-vous non honorés représentent une problématique majeure dans leur organisation quotidienne.
Un rendez-vous non honoré a deux conséquences majeures sur l’organisation des soins :
- Une perte de chance pour les patients. Les rendez-vous non honorés par certains privent en effet d’autres patients d’un accès aux soins. À l’échelon de la France, un rendez-vous non honoré par jour par médecin représente 27 000 000 de consultations annuelles, soit l’équivalent du temps de travail d’environ 4 000 médecins (ramenés à un rythme de 3 consultations par heure et 50 heures de travail par semaine).
- Une perte d’attractivité de la médecine libérale à un moment où on a du mal à convaincre les médecins de s’installer. Selon les estimations réalisées par l’URPS médecins libéraux Île de France, les rendez-vous non honorés correspondent en moyenne à 1 à 2 jours de présence au travail non rémunérés par mois.
Pour la plupart des médecins répondants, les solutions d’information et de prévention sont dépassées et nombreux appellent avec regrets à des sanctions pour éviter ces comportements. Parmi elles, le prépaiement, la liste rouge des patients n’honorant pas leur rendez-vous, la majoration d’un dépassement exceptionnel au prochain rendez-vous, sont les solutions les plus souvent citées comme pouvant être efficaces.
En ce moment de crise de notre système de santé où le temps médical est précieux et recherché, l’URPS médecins libéraux d’Île-de-France appelle à la mise en place de mesures concrètes pour prévenir et contrôler ces conduites qui touchent aussi bien la médecine de ville que l’hôpital.
Au regard des témoignages des médecins libéraux, l’URPS médecins libéraux d’Île-de-France demande :
- Une campagne nationale d’information sur l’accès aux soins, permettant de sensibiliser les usagers au respect de leur rendez-vous
- Le développement des fonctionnalités des plates formes de prise de RDV en ligne, notamment :
- La systématisation des SMS de rappel de RDV 24 heures en amont et simplicité d’annulation
- L’impossibilité de prendre deux RDV simultanés dans la même spécialité sans avoir au préalable annulé sa première réservation
- Le développement d’une option de prépaiement que les médecins pourraient volontairement activer notamment pour les prises de RDV concernant les nouveaux patients n’ayant jamais consulté le praticien.
Ces mesures restent à ce stade préventives, l’URPS médecins libéraux ne souhaitant pas promouvoir d’actions visant au signalement, ou à la sanction des usagers coutumiers de ces comportements mais si la tendance se maintient il conviendra de réfléchir à des dispositifs plus contraignants pour le bénéfice de tous les patients.
Suite de l’article du Parisien :
« C’est un scandale quand on connaît les problèmes d’accès aux soins »
Cette enquête francilienne reflète une réalité nationale, selon René-Pierre Labarrière, président de la section Exercice professionnel du Conseil national de l’Ordre des médecins et généraliste en Haute-Savoie. « Même des radiologues sont confrontés à ce problème pour des rendez-vous d’IRM », raconte-t-il. « C’est un scandale quand on connaît les problèmes d’accès aux soins », s’agace Jérôme Marty, médecin généraliste en Haute-Garonne et président du syndicat Union française pour une médecine libre (UFMLS). Lui déplore deux à trois rendez-vous manqués par jour, « sans alerte ni excuse ».
Alors que plus de cinq millions de Français n’ont pas de médecin traitant, l’URPS-Médecins libéraux d’Île-de-France dénonce une « perte de chance pour les patients ». L’association a fait ses calculs : un rendez-vous manqué quotidien par médecin en France représente 27 millions de consultations annuelles, soit l’équivalent du temps de travail d’environ 4 000 médecins. « C’est énorme », souffle Jérôme Marty, persuadé que « si on réglait cette problématique », celle des urgences saturées s’améliorerait. « Sur les 26 millions de passages aux urgences -publiques et privées- par an, 20 % ne relèvent pas d’une urgence véritable mais plutôt de la médecine de ville », explique le médecin. Combler les rendez-vous manqués permettrait donc, avance-t-il, de prendre en charge ces consultations non urgentes et désengorger ainsi un service en crise.
Les nouveaux patients, premiers concernés
Un praticien sur deux interrogés par l’URPS-Médecins libéraux d’Île-de-France considère que la tendance est plutôt à la hausse. Valérie Briole, présidente de l’association, parle plutôt de « vagues », des « périodes où le phénomène se produit davantage », comme pendant l’épidémie de Covid-19 ou au moment des départs en vacances. « Les patients oublient alors d’annuler », observe la rhumatologue parisienne.
Qui sont ces insouciants qui posent des lapins ? Pour Jérôme Marty, il s’agit de personnes jeunes, entre 20 et 40 ans. « Ils doivent considérer que la santé est un bien marchand et sont dans la consommation pure », déplore-t-il. « Ce sont, à 70 %, des nouveaux patients, qui ne connaissent pas le praticien », détaille Valérie Briole. Arrivent ensuite les patients en tiers payant et ceux qui ont des délais de rendez-vous de plus d’un mois. « Les deux tiers des rendez-vous non honorés ont été pris via des plates-formes », précise-t-elle. Au total, ces personnes représentent « 5 à 10 % » de la patientèle.
Facturer les lapins ?
Pour lutter contre les lapins, l’URPS-Médecins libéraux d’Île-de-France préconise une campagne nationale d’information sur l’accès aux soins. Elle conseille également aux plates-formes de systématiser le SMS de rappel 24 heures en amont ainsi que l’impossibilité de prendre deux RDV simultanés dans la même spécialité. Mais, pour la plupart des répondants, « les solutions d’information et de prévention sont dépassées » et ils sont nombreux à appeler « avec regrets à des sanctions pour éviter ces comportements », constate l’association.
Certains professionnels aimeraient ainsi avoir la possibilité de facturer les rendez-vous non honorés sans excuse valable, comme le fait la Belgique. Le syndicat UFMLS avait lancé une pétition en ce sens en 2019. « On l’a relancée il y a deux semaines et elle a gagné près de 2000 signatures », indique Jérôme Marty. Où irait l’argent récolté ? « Pourquoi pas dans un fonds géré par la profession et qui aurait pour objectif de travailler à résoudre le problème des déserts médicaux ? » Cette somme « pourrait être versée à l’Assurance maladie », avance de son côté un neurologue, praticien hospitalier en Auvergne-Rhône-Alpes. Jean-Jacques Fraslin, médecin généraliste dans la banlieue nantaise, plaide lui pour « une empreinte bancaire, 5 euros par exemple, associée à la prise de rendez-vous, en particulier pour les nouveaux patients ». En cas de lapin non excusé, l’argent serait versé à une association caritative.
La lutte contre les rendez-vous médicaux non honorés fait partie des axes prioritaires à explorer pour espérer « redonner du temps de soins aux soignants », estimait François Braun dans son rapport sur les urgences et les soins non programmés, remis le 30 juin au gouvernement, quelques jours avant qu’il ne devienne ministre de la Santé. Sera-t-elle abordée à la rentrée lors de la convention des parties prenantes, impliquant les acteurs de la santé et de la société civile ? Le ministère de la Santé ne nous a pas répondu sur ce point. « On l’espère et on fait tout pour», insiste de son côté Jérôme Marty. « C’est un moyen pas cher et facile de protéger le temps médical », abonde Valérie Briole.
Signez la pétition pour un droit à facturation des consultations non honorées chez les médecins et soignants :
Je fonctionne SANS RDV. Depuis mon installation 1987
Les patients connaissent mes horaires 9h30- 12h30 et 14.30 17h
Tous sont vus dans la journée
Je fais volontiers
les visites domicile pas d’immeuble pas d’étages je me gare à 5-10metres du domicile
Je suis à 56 km du CH
Avec la solution madeformed, un lapin c’est tout de suite un SMS de remontrance et une absence comptabilisée. À la troisième absence le service ne permet plus la prise de rdv (Blacklist). Ça n’empêche pas les lapins, mais ça responsabilise les auteurs de lapins et surtout ça évite de trop s’énerver…
Bonne journée