Communiqué de presse:
accident du travail et COVID19, les médecins et soignants libéraux, ces héros privés de reconnaissance
Paris, le 21 juin 2020
Préambule :
Tous les soignants libéraux conventionnés appartiennent au régime de sécurité sociale des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnées (PAMC) géré par les CPAM. Ce régime est un contrat historique et moral entre l’Assurance Maladie et les praticiens conventionnés. Il propose en échange de l’application de tarifs conventionnés une couverture maladie pour 0.1% du bénéfice non commercial (BNC). C’est à dire qu’au titre de leur rôle prépondérant dans le maintien de la Santé Publique, en acceptant la perte de fixer librement leurs honoraires, ceci afin que les français disposent d’une offre médicale identique, abordable et accessible à tous, les praticiens ne payent leur assurance maladie qu’à hauteur de 0.1% au lieu des 6.5% que cotisent les autres travailleurs indépendants (artisans et commerçants, ou praticiens non conventionnés).
Toutefois le régime des PAMC n’intègre que le risque maladie et accidents domestiques. Le risque accident de travail et maladies professionnelles (AT/MP) en est exclu, à l’inverse des autres travailleurs indépendants qui en bénéficient. Ce risque AT/MP est couvert par la souscription d’une assurance volontaire (AVAT), facultative, que peu de praticiens souscrivent par méconnaissance de leur régime de couverture, parfois même sur les conseils des CPAM ou de comptables très mal avisés sur les particularités des PAMC.
C’est dans ce contexte d’absence de couverture du risque AT/MP pour les libéraux conventionnés que le 21 avril Olivier Véran à l’Assemblée Nationale a fait la promesse de reconnaissance automatique de la covid en maladie professionnelle, confirmé par Nicolas Revel par un tweet le 29 avril indiquant l’absence de toute condition de ressource ou de souscription à l’AVAT.
Ce que nous constatons ce jour :
2 mois après la promesse du ministre de la Santé Olivier Véran, aucun décret n’a été publié à notre connaissance pour confirmer la prise en charge en maladie professionnelle des soignants tombés malades.
La famille d’un médecin décédé du covid a même reçu depuis un courrier de sa CPAM indiquant l’absence totale de prise en charge (et donc sans participation d’une quelconque mutuelle ou assurance), justifiée par l’absence d’adhésion à l’AVAT par le médecin de son vivant.
Cette situation inadmissible et le retard à transformer dans les faits des promesses politiques est un mépris supplémentaire envers les soignants libéraux, à rajouter à la longue liste des mépris subis depuis des dizaines d’années et dénoncées par l’UFML-S, ainsi que ceux révélés par l’épidémie.
Nous rappelons en effet la responsabilité lourde de l’État qui a demandé aux soignants libéraux de rester au front en ville pour éviter l’afflux des patients dans les hôpitaux au bord de la submersion, tout en les privant de moyens de protection par la réquisition des maigres stocks disponibles, sans les redistribuer correctement, équitablement ou dans les temps. La volonté de cacher le nombre de soignants libéraux décédés du covid en est la preuve.
Le rôle dans le maintien de la Santé Publique, qui justifie le régime d’exception des PAMC, a été vital en cette période difficile d’épidémie de covid, et fut reconnu et salué par tous les français par des applaudissements quotidiens à 20h. Force est de constater que cette reconnaissance n’a jamais été suivie par les instances dirigeantes, particulièrement pour les médecins de ville.
De plus, nous constatons qu’à la suite d’un communiqué de presse de l’Institut de la Protection Sociale (IPS) le 14 mai, alertant sur l’absence d’application de la couverture AT/MP pour les ex-affiliés au régime sociale des indépendants (RSI) désormais gérés depuis le 1er janvier 2020 par les CPAM, l’État a, pour éviter l’ouverture d’un nouveau front de mécontentement, donné immédiatement l’ordre aux CPAM de couvrir le risque AT/MP sans condition aux ex-RSI, en excluant l’ensemble des PAMC ! C’est à dire que bien que gérés par les même CPAM, les ex-RSI et les PAMC n’ont pas les mêmes couvertures sociales. Les PAMC ont même une couverture sociale moindre : pas de AT/MP, avec les conséquences dramatiques que nous pouvons imaginer.
Pour rappel, un séjour en réanimation peut coûter jusqu’à plusieurs dizaines de milliers d’euros, entièrement à la charge du patient ou de sa famille en l’absence de couverture du risque AT/MP ! Il est facile de comprendre pourquoi cet ordre donné aux CPAM n’a pas été suivi d’un communiqué de presse de la part de la CNAM, et s’est fait dans une relative discrétion administrative.
Aussi, le contrat historique liant les PAMC et l’Assurance Maladie est devenu un contrat léonin, c’est à dire qui ne bénéficie qu’à une seule partie. En effet si initialement il s’agissait d’offrir en l’échange de tarifs conventionnés et l’absence de dépassement d’honoraires une ristourne sur des cotisations sociales pour les praticiens, force est de constater, année après année, que l’absence de revalorisation des tarifs conventionnés ne s’est soldée par aucune contrepartie pour l’Assurance Maladie. Pas même l’alignement des prestations sociales des praticiens à celles des autres travailleurs indépendants, puisque les praticiens conventionnés continuent à ne pas être couverts par le risque AT/MP pour ce qui est de la prise en charge des soins.
Nous constatons donc que le contrat social entre les praticiens conventionnés et l’Assurance Maladie est désormais caduque. En effet en 2020, en l’échange d’un cadeau de seulement 6.4% de leur BNC, les praticiens doivent subir des tarifs conventionnés les plus faibles d’Europe, et même du G20. Pour rappel, une consultation de médecine générale est à 25€ tandis que la moyenne européenne est à 50€. Cet écart existait à peine il y a 30 ans car les tarifs français étaient dans la moyenne européenne.
C’est à dire que la contrepartie d’un cadeau de 6.4% du BNC s’est transformée en 30 ans d’une simple interdiction des dépassements d’honoraires … en la division par deux du revenu à l’acte ! Ce lent glissement en défaveur des praticiens et au seul bénéfice de l’Assurance Maladie doit cesser.
C’est pour toutes ces raisons que l’UFML-S demande :
- La publication immédiate du décret de prise en charge en maladie professionnelle des praticiens malades du covid, comme promis il y a 2 mois par le ministre de la Santé.
- La fin du régime spécial des PAMC qui est devenu un contrat léonin. Il est inadmissible de n’obtenir que 6.4% de ristourne de cotisations sur un BNC en contrepartie de la division par deux de la moyenne européenne des tarifs à l’acte, et donc une chute phénoménale de la rémunération des praticiens libéraux.
- L’application de l’article 160 du Code de la Sécurité sociale (« Toute personne travaillant ou, lorsqu’elle n’exerce pas d’activité professionnelle, résidant en France de manière stable et régulière bénéficie, en cas de maladie ou de maternité, de la prise en charge de ses frais de santé … ») à l’ensemble des travailleurs indépendants, qu’ils soient conventionnés ou non, médicaux ou non.
Cette application de la loi à tous serait une mesure d’égalité citoyenne consistant à aligner les prestations sociales des PAMC sur le régime des artisans et commerçants, lui même identique à celui des salariés pour ce qui est de la couverture de la prise en charge des soins dans le cadre du risque AT/MP.
Il est en effet inadmissible qu’une catégorie professionnelle, c’est à dire l’ensemble des soignants libéraux, qui a montré son utilité sociale fondamentale pendant l’épidémie, puisse continuer à être traitée de façon aussi inégalitaire vis à vis de la protection sociale.
Relations presse :
Laurent Payet /Sarah Bonoron / Langage et Projets Conseils
laurent@lp-conseils.com / sarah@lp-conseils.com/ 01 53 26 42 10 / 06 89 95 48 87
UFML syndicat : le syndicat de l’union française pour une médecine libre
Pour en savoir plus :
- https://www.ufml-syndicat.org/fact-checking-accident-du-travail-et-covid19-les-medecins-et-soignants-liberaux-ces-heros-prives-de-reconnaissance/
- https://www.ufml-syndicat.org/reconnaissance-automatique-du-covid-en-maladie-professionnelle-la-fausse-bonne-idee/